Dans le sud, tout comme en France entière, le millésime 1994 n’a pas été des plus faciles. Le Languedoc a été relativement épargné au regard d’autres régions comme la Loire, le Rhône, le Médoc… Du soleil, il n’en a pas manqué, parfois trop, car certaines vignes (syrah) ont subi un stress hydrique (blocage des maturités). Cependant les pluies d’équinoxes ont été bien présentes favorisant ainsi ceux qui ont récolté avant (cépages précoces, zones maritimes, petits rendements). Les bouteilles ont été servies dans le plus parfait anonymat dans cet ordre aléatoire.
- Château La Voulte Gasparets “Romain Pauc” Corbières
- Qui ne connaît pas la cuvée Romain Pauc, un des fleurons de la nouvelle viticulture languedocienne. Monsieur Reverdy a osé exposé au grand jour les grandes qualités du cépage maudit : le carignan. D’une robe grenat intense bordé d’orange, le nez s’exprime avec douceur et simplicité sur des notes de fruits noirs, de caramel, de cacao. La rondeur aborde la bouche, équilibrée et souple, elle manque cependant d’expression aromatique et semble s’être refermée.
Château Pradeaux Bandol
- Echantillon malheureusement défectueux au goût de bouchon et de planche pourrie.
Château Paul Blanc Costières de Nîmes
- Un des premiers de la dégustation tellement ce costières a séduit par sa couleur grenat pourpre, son riche et explosif nez de cassis, de réglisse, de cuir et viande grillée. La bouche faite de rondeur de fruits mûrs et de superbes tannins donne à cette syrah un charme gourmand inattaquable. Pour les amateurs de soleil!
Domaine de l’Aiguelière “ fût de chêne” Coteaux du Languedoc-Montpeyroux
- L’aiguelière ne laisse jamais indifférent. Cette cuvée “fût de chêne” le démontre encore aujourd’hui et se goûte très agréablement. la robe hésite entre pourpre noir et grenat, mais déjà cacao, cade, morilles, cuir corsent une vendange sans doute très mûre. Au velours de l’attaque, succèdent un équilibre superbe, le charnu enveloppant une charpente solide. Vin jouissif par excellence il ne peut que laisser qu’un souvenir… “torride”!
Domaine Cazes “ credo” Vin de pays des côtes catalanes
- Figures incontournables du Roussillon, les frères Cazes se font plaisir chaque année avec la cuvée “credo” dans laquelle ils incorporent uniquement des cépages bordelais. Le résultat est régulier et le “credo” est un succès dès sa sortie. 7 ans plus tard, il tient encore. La couleur, encore rubis, éclate de jeunesse. En bouche, le corps se fait léger, souple, charmeur, aux notes fruitées et empyreumatiques. Et le nez? il évoque la pâtisserie, fruits confits, brioche aux raisins, caramel, crème de lait, chocolat au lait… Etonnant non?
Michele Chiarlo “supériore” Barbera d’Asti
- Réputé pour ces Barolo et Barbaresco, Michele Chiarlo diffuse assez facilement ses Barbera d’Asti qu’il décline en différentes cuvées. Celle-ci ne fut pas inintéressante dans sa jeunesse, goûtée entre amis, sur le comptoir d’une trattoria, accompagnée de charcuterie ou fromages du Pièmont. Aujourd’hui le résultat est plutôt décevant, trop léger, fatigué, début d’oxydation, le charme s’est envolé, restent les souvenirs… précieux!
Mas de Daumas Gassac Vin de Pays de l’Hérault
- On ne présente plus Daumas, tant sa notoriété est établie. Il produit de grands vins sur un terroir exceptionnel à partir de vignes non clonées afin que chaque cep puisse exprimer sa personnalité. Ce 94 ne s’exprime pourtant pas à la perfection. Dans une phase ingrate, le nez laisse deviner ses parfums de fruits et de fumé derrière des effluves chaleureuses d’alcool. La bouche est énergique, vive, presque violente et demande encore quelques années avant de s’apprivoiser. Avec Daumas, il faut savoir être patient!
Mas Jullien “les Depierre” Coteaux du Languedoc
- C’est peut être le plus méditerranéen de la soirée, robe rubis tendre bordée d’ambre, nez d’épices, d’olives, de fruits secs, d’herbes coupées. D’un corps moyen, il sait séduire par sa facilité, son élégance et sa rondeur sympathique.
Domaine Borie de Maurel “cuvée Sylla” Minervois
- Le sorcier de Félines a encore frappé. Les aléas du millésime lui il connaît pas, cette syrah est superbe. Robe noire opaque, nez intense et complexe, bouche extravertie, distribuant ses arômes d’épices, de garrigue, de cacao, fruits rouges confits, de havane, le tout avec la fraîcheur et le relief d’un jeune premier. La finale est d’une douceur extrême. Certains ont parlé d’extase!
Merci à tous et à l’année prochaine pour le millésime 95.